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JOUER, un plaisir nécessaire

Jouer, un plaisir nécessaire

Voici un article pour rappeler que jouer est un plaisir nécessaire.

Beaucoup de parents me disent que leur enfant ne sait pas jouer tout seul, qu’il ne sait pas quoi faire avec les jeux, qu’il a plein de jouets dans la chambre mais qu’il marche dessus et ne joue pas, etc…

Je constate aussi que certains enfants saturent du trop ou du pas assez :

  • trop d’activités cadrées et imposées (agenda de ministre),
  • trop d’écrans
  • trop d’instabilité
  • trop de jouets inadéquats,
  • trop de contrôles envahissants
  • pas assez de temps pour jouer librement
  • pas assez d’espaces de jeu bien organisés
  • pas assez de jeu d’extérieur,
  • pas assez de sécurité affective, …

Cet article peut vous aider à comprendre certains éléments auxquels il convient de prêter attention afin de favoriser l’installation au jeu des enfants en lien avec les autres.  Je vous souhaite une bonne lecture.

1/ LAISSER DU TEMPS LIBRE AUX ENFANTS POUR JOUER

Petits bateaux

Petits bateaux

Il est important de laisser du temps libre aux enfants pour qu’ils jouent seuls, à plusieurs, avec ou sans les adultes.

Un enfant a besoin de temps pour se poser et pour imaginer son jeu.

Alors qu’un enfant passe moins de 900 heures annuelles sur un banc de l’école, il dispose de plus de 2500 heures, hors sommeil pour son temps libre.

L’enfant se trouve donc lié à un processus «d’éducation permanente».

Il est à noter que l’enfant n’a pas conscience qu’il est éduqué ou «élever» dans cette permanence éducative.

Il convient donc d’aménager des espaces de jeu en intérieur et en extérieur et d’offrir du temps aux enfants pour que ces 2500 heures soient les plus bénéfiques pour lui.

Un jeune enfant a besoin par ailleurs, de marcher environ 4 kms au fil de la journée pour se dépenser.

2/ AMENAGER DES ESPACES DU JEU DEDANS/DEHORS

Il est vraiment important de laisser les petits évoluer au sol plutôt que de les laisser dans les transats même s’ils vous semblent très confortables. L’enfant peut ainsi mieux bouger, s’étirer, se tourner, lever les jambes et les bras pour attraper les objets (jouets). Attention de bien mettre des objets adaptés à la préhension de l’enfant (faciles à prendre, pas lourds, pas trop bruyants), selon s’il est allongé ou assis.

Quand l’enfant commence à faire du 4 pattes ou à se mettre debout, il convient de mettre à sa disposition des points d’appuis (mousses, poufs, supports adaptés à son évolution motrice et de lui proposer des jouets d’éveil sensoriels qu’il pourra bouger, traîner, rouler, empiler, déverser, encastrer,…etc…

Quand l’enfant marche et parle, il peut mieux exprimer ses besoins ludiques. Cependant l’adulte devra veiller à mettre à sa disposition des jouets adaptés à son développement. Les recommandations inscrites sur les boîtes ne sont pas toujours en adéquation avec les besoins des enfants. Par exemple : le poids, la taille du jouets ne correspond pas. L’enfant n’a pas toujours la force pour le soulever, ou la préhension est bien pour l’adulte, mais pas adaptée à la main de l’enfant qui est petite. Il convient donc de s’interroger avant l’achat ou la mise à disposition sur le « bon » matériel qui favorisera la découverte.

Quand l’enfant grandit, il convient aussi de proposer des jeux de règles ou d’assemblage adaptés aux compétences de l’enfant afin de ne pas le mettre en échec. Ceci aurait pour effet d’empiler des mémoires négatives qui à terme pourraient le «dégoûter» de jouer à ces supports. Avant l’acquisition de la lecture, il convient de proposer des jeux avec des pièces (pions) qui se rapprochent plus aux jouets avec des règles simples à comprendre, ou de bien prendre le temps d’expliquer à l’enfant comment jouer, si la règle est plus complexe pour qu’il prenne du plaisir (attendre son tour c’est difficile pour un petit). Il est aussi préférable de jouer plusieurs fois au même jeu pour que l’enfant atteigne la maîtrise en développant des tactiques et en trouvant du plaisir.

Les univers de jeu vont avoir une importance, notamment à travers les illustrations.

Jusqu’à 5/6 ans (l’âge d’acquisition de la lecture), l’enfant préfère souvent jouer près ou avec vous (ça le sécurise), et avec des jouets, d’où l’importance d’aménager des espaces dans les salles de vie de la maison plutôt que dans les chambres s’il doit jouer seul.

Aménagement 1Il convient de porter un regard sur le matériel mis à disposition des enfants en ne conservant que du matériel de qualité. Les chambres sont souvent saturées de matériels non adaptés ou éparpillés. Il convient donc de ranger les jeux de règles et d’assemblage en laissant ces boîtes à disposition en autonomie sur des étagères.

Donner l’habitude de ranger les jeux après l’usage permet aux enfants de les retrouver en bon état pour jouer (vous pouvez faire participer les enfants au rangement en leur expliquant comment faire). Des pictogrammes (images) peuvent les aider.

Si l’enfant voit les jeux ou les bacs de jouets, il aura plus envie de s’installer que si le jeu est placé à 1m80 dans un placard fermé.

3/ CONNECTER LES OBJETS PAR UNIVERS

Cholet (10)Pour les jouets, il convient de trier les objets, de jeter ce qui est cassé ou très abîmé, et de compléter les thématiques. Vous pouvez faire l’acquisition de bacs, étagères, commodes à tiroirs…à voir selon vos envies.

L’essentiel étant de regrouper les éléments par univers et de favoriser l’accès par l’enfant (pour le rendre plus autonome). Par exemple, si vous avez un château fort, vous pouvez mettre dans un contenant les éléments qui pourraient y être associés : chevaliers, rois, princesses, dragons, armes… Vous pouvez également accrocher à une patère des tuniques de chevaliers, robe de princesse, couronne de roi,…etc. Vous pouvez aussi lire des histoires aux enfants sur la même thématique afin de nourrir leur imaginaire pour inventer des histoires dans leur jeu à partir de leur culture (lecture). Un enfant de 6 ans a peu de culture, lui lire des histoire l’aide à faire des liens et favorise la mise en jeu.

Ainsi, les éléments de jeu pertinents tant quantitatifs que qualitatifs vont être des inducteurs ludiques (vont induire le jeu), qui donneront encore plus l’envie aux enfants de s’installer à jouer en toute liberté, surtout si vous leur laissez du temps! N’hésitez pas à multiplier les univers, selon l’âge des enfants : ainsi, dinosaures, marchande, bricolage, poupées, animaux de la jungle, de la ferme, cirque, mais aussi jeu de construction ou jeu de règle à thème… ou autres peuvent être imaginés. Vous pouvez aussi apporter des éléments qui vont compléter et enrichir les espaces du jeu : kapla, bois, galets, arbres miniatures, cartons,…tissus, cabanes, …

4/ FAVORISER LA MISE EN JEU ET LA CREATIVITE

Dans une fratrie, les plus grands montrent souvent aux plus petits les possibilités de jeu et inventent des histoires en incluant les plus jeunes, ce qui est une vraie richesse pour développer la culture ludique enfantine que ce soit à la maison, à l’école ou dans les parcs.

Quand ils sont jeunes (moins de 5/6 ans), les enfants aiment jouer près de vous ou avec vous (besoin d’être sécurisés), mais ils aiment aussi être un peu cachés du regard de l’adulte (liberté de faire) … vous pouvez donc, soit installer des petites cloisons basses ou tendre des tissus pour offrir des espaces d’intimité au jeu, ou installer un coin cabane, tipi…avec des tapis et coussins pour favoriser l’intimité du jeu tout en sécurisant l’enfant par votre présence discrète.

Chaque enfant doit aussi trouver sa place dans le jeu : si vous avez 3 enfants, vous pouvez installer une table avec 3/4 petites chaises, vous pouvez mettre un bac avec des albums à lire pour des âges différents en lien avec les univers de jeu proposés, vous pouvez ranger les jeux de règles et d’assemblage par catégories, les plus complexes en haut de l’étagère, les moyens au milieu, les jeux pour les plus petits en bas. Ainsi, chacun dispose du matériel adapté à son développement, ce qui va les aider à trouver leur juste place en partageant des moments joyeux avec les autres. Les grands peuvent retrouver les traces sensorielles en rejouant à des jeux qu’ils ont aimé plus petits et les petits peuvent progresser en jouant avec les plus grands…selon les envies de chacun.

L’espace matériel est un élément déterminant pour développer la relation entre les enfants à travers leur jeu. C’est essentiel, pour accumuler des mémoires sensorielles positives nécessaires au développement de la confiance en soi et au bien-être en lien avec les autres.

Kinder mit einem DosentelefonL’espace matériel va donc aider à développer l’espace relationnel. Il faut prendre conscience aussi qu’il peut le «tuer», c’est à dire que si les enfants ne trouvent pas leur place, ils vont se fâcher, voire, se battre pour avoir la même chose (particulièrement entre 2 et 4 ans). Il convient donc de proposer des univers de jeu avec suffisamment de jouets afin de permettre à chacun d’avoir un «rôle» pour participer selon son développement ou ses envies..

Il est aussi important de multiplier les expériences ludiques dedans et dehors.

Toutes ces découvertes ludiques vont laisser des empreintes positives. Les enfants aimeront ainsi recommencer et complèteront leurs jeux grâce à leurs acquis. Il vont avoir du plaisir à retrouver les temps partagés, à être avec les autres, essayer, faire, refaire (surtout), imaginer, raconter, découvrir, se divertir, … jouer tout simplement seul ou avec les autres.

5/ VALORISER LE JEU

Quand on joue, il se passe beaucoup de choses dans le cerveau et dans le corps.

En effet, le jeu est une activité d’ordre physique ou intellectuelle qui va influer les émotions et les comportements (attitudes). Il convient donc de valoriser le jeu pour ses effets bénéfiques.

Notre cerveau ne se développe que s’il est stimulé. Le jeu (comme d’autres activités) permet de développer des connexions neuronales et donc par conséquence de développer le cerveau.

Jouer favorise ainsi la libération d’hormones comme la dopamine (hormone du plaisir) ; la sérotonine (hormone de la bonne humeur), les endorphines (hormone du bonheur – neurorégulateur).

Jouer active les circuits neuronaux qui vont avoir pour effet de réduire le stress (cortisol) qui affecte les zones de la mémoire, la perte d’attention et de repérage dans l’espace, …

Les enfants stressés sont souvent très agités. Jouer leur permet de se poser et de retrouver des chemins plus doux pour les apaiser.

Si vous souhaitez valoriser le jeu, il convient de veiller à :

  • Aménager des espaces agréables (peindre, tapisser, aménager),
  • Proposer du matériel qualitatif (jeter ce qui cassé ou inadapté),
  • Prévoir l’installation pour tous les joueurs (pour que chacun trouve sa place facilement),
  • Organiser des thématiques, les compléter, les enrichir,
  • Imaginer des mises en scènes (décors fantaisistes),
  • Favoriser le rangement par des contenants en bacs gerbables, des étagères à hauteur adaptée (avec des pictogrammes pour aider l’enfant à être plus autonome),
  • Accompagner l’enfant dans son jeu (valorisation verbale, le sécuriser),
  • Laisser du temps (par séquence d’au moins 20 à 30 mn minimum – le prévenir avant la fin),
  • Fixer les règles d’usage des jeux (je sors, je range ou je mets de côté, je retrouve).

ExplorerL’enfant est plus créatif s’il dispose de temps pour lui et si en parallèle, dans son environnement, il a à sa disposition du matériel qui l’aide à développer sa curiosité, son ingéniosité, sa recherche.

Jouer est un plaisir qui ne s’impose pas !

J’apporte un éclairage sur cette question du jeu à travers la conférence intitulée

«Jouer un plaisir nécessaire!»

Si vous souhaitez la programmer dans votre commune, je reste disponible pour envisager ce projet avec vous. Ogerpatricia@orange.fr ou 0678957747

Je vous en remercie par avance.

Plus d’infos : Je clique 

Cohabitation des ludothèques et des bibliothèques

Il faut sauter

Faites le Saut

Cohabitation du livre et du jeu

Les médiathèques  voient leurs fonctions évoluer, elles se cherchent dans ces mutations sociales et culturelles. Les ludothèques apparaissent aujourd’hui comme une réponse presque logique à l’existence d’une cohabitation avec les médiathèques. Pourtant, il est nécessaire de rappeler que dans les années 1980 à 1990, les politiques en vogue sur le développement de « Nouvelles » médiathèques avec de « Nouvelles » constructions parfois majestueuses, pour renforcer l’image urbaine de la ville, ont  à cette période, ignoré, parfois même dénigré le travail des ludothèques. Celles-ci ont de ce fait peiné à évoluer avec de modestes  moyens au regard de ceux attribués aux médiathèques. Beaucoup de villes (trop certainement) ne se sont, à ce jour, toujours pas dotées de ludothèques ! Je suis tentée d’ajouter hélas !

LA LUDOTHEQUE EST UN OUTIL A VALORISER

La volonté et la motivation de nombreux ludothécaires et la force du réseau ont malgré tout permis de développer de nombreuses structures sur le territoire, j’ajouterai presque  « contre vents et marées » parfois !

La France compte cependant 1200 ludothèques et 40% d’entre-elles sont publiques (source ALF).

Certains élus ne comprennent toujours pas  pourquoi les ludothèques rencontrent un tel succès et sont autant fréquentées. J’en suis toujours étonnée moi-même (non pas que les ludothèques soient aussi fréquentées, mais que des élus pensent ceci !) .

Comment peut-on encore nier l’apport du jeu et du jouet dans notre société ? Juste pour info un Musée parisien est consacré à cet art :

Musée de l’art ludique

Pourquoi les pouvoirs publics accordent-ils aussi peu d’importance au premier outil d’acculturation de l’enfant, celui qui va l’amener à découvrir et comprendre le monde, celui qui va lui faire découvrir la lecture? Pourquoi les pouvoirs publics s’intéressent-ils aussi peu à un domaine qui est en plein développement et qui favorise l’autonomie de l’individu, l’intégration, son éducation, son enrichissement ? Il est utile de considérer le nombre de métiers et par conséquence de professionnels qui utilisent le jeu dans leurs activités développées auprès des personnes. Les ludothécaires apportent un soutien à une multitude de professionnels, je ne vais en citer que quelques uns :

  • Puéricultrices, auxiliaires de puériculture,
  • Assistants maternels, parents, grands-parents (qui ont la garde d’enfants),
  • Éducateurs de jeunes enfants, éducateurs spécialisés,
  • Moniteurs  éducateurs, animateurs,
  • Professeurs des écoles, instituteurs, enseignants spécialisés, ATSEM,
  • Travailleurs familiaux,
  • Psychologues, psychiatres,
  • Orthophonistes, psychomotriciens, psychopédagogues, ergothérapeutes, kiné…,
  • Médecins, pédiatres,…
  • Historiens du jeu, chercheurs, ethnologues,
  • Universitaires, étudiants, formateurs en RH,
  • Industriels, créateurs, artisans, commerciaux,…

Les ludothécaires  devraient  communiquer plus sur tout le travail assuré auprès de nombreux organismes et leurs publics. L’impact de l’utilisation du jeu varie donc  selon le milieu dans lequel il est valorisé et utilisé. Sa finalité en est modifiée,  reste néanmoins que le ludothécaire a un rôle important dans les différentes approches de ces pratiques.

Le ludothécaire doit avoir des connaissances sur les spécificités des besoins des personnes et sur les pratiques du jeu. Il est en capacité de développer des collections de jeux et de jouets en adéquation avec tous ces besoins. Il apporte  des conseils pertinents aux professionnels que ce soit dans  le domaine de la psychologie que celui de la santé ou encore les secteurs liés aux  activités sociales, culturelles, éducatives, touristiques, scientifiques,..

Les ludothèques ont su s’adapter aux mutations et leurs compétences se développent au fil de leurs évolutions. Il est seulement dommage, que certains responsables politiques n’aient pas  senti cette tendance dès les années 80 et 90, et même ensuite vers les années 2000 pourtant prometteuses, mais il n’est pas trop tard !

Il conviendrait que dans leurs projets politiques, ils ne voient plus les ludothèques comme une réponse « bouche-trou » à des politiques en pleines mutations : TAP, bibliothèques médiathèques en mutation, violences dans les quartiers…mais qu’ils voient la ludothèque comme un véritable service à la population. Certains Elus l’ont bien compris et mettent des moyens pour les développer.

La ludothèque est un formidable outil, dont les objectifs doivent être intégrés aux réflexions des politiques urbaines, sociales, éducatives et culturelles en prenant en compte leurs fonctions et en leur donnant des ressources à la hauteur des ambitions.

Les Villes voient leurs budgets sacrifiés de par le désengagement de l’Etat sur certains domaines, et doivent repenser leurs projets pour calculer au plus juste leurs répartitions budgétaires tout en ne perdant pas de vue leurs objectifs auprès des populations qui par ailleurs, paient des impôts et attendent des services de proximité. En période de crise, l’heure est donc de repenser des projets plus tournés vers les  besoins de la population, plutôt qu’à des opérations de prestige et de communication.

DÉVELOPPER UNE POLITIQUE DU JEU

position of stones during go game playingIl conviendrait de s’intéresser aux politiques du jeu complémentaires à celle du livre, toutes aussi efficaces  à « Élever » l’individu et à le structurer d’un point de vue social, culturel, éducatif et psychologique. Il ne faut pas perdre de vue que le jeu est le premier outil d’acculturation de  l’enfant, et qu’il est un préalable important à la lecture.

Développer  des ludothèques structurées dans les communes, les quartiers et dans les cœurs de villes a un impact sur la vie des personnes pour leur éducation. Ceci n’est pas à négliger, surtout dans le contexte actuel.

Je lance cette réflexion comme une petite goutte d’eau dans la mer. Mais, si cette réflexion pouvait avoir un impact aussi petit soit-il, je me dis que ce sera toujours çà !

J’ai commencé à travailler dans le milieu des ludothèques dans les années 79. J’ai eu la chance de travailler dans différents milieux : ludothèque de quartier difficile, ludothèque à l’hôpital, ludothèque de centre ville, ludothèque en école de sourds muets, ludothèque dans des campings, ludothèque en ONG, ludothèque de cœur de ville, j’ai animé de multiples ateliers auprès de personnes fragilisées et malmenées par la vie (accident, handicap, déficiences intellectuelles ou physiques…) et j’ai pu observer que le jeu était un formidable outil pour tous. C’est l’outil de la liberté et de la réparation.  J’ai pu observer l’apport bénéfique de ces ludothèques auprès des personnes. Je ne peux aujourd’hui que les défendre et valoriser leurs actions comme un acte engagé, responsable et efficace sur le terrain.

Une ludothèque, c’est une arme de paix dans un quartier, un outil de médiation formidable, un lieu sécurisant, un lieu de parole, un lieu de réconfort, un lieu de rencontre, un lieu de tolérance, un lieu de partage, un lieu de convivialité, un lieu de joie, un lieu de détente, un lieu de découverte, un lieu d’éducation, un lieu d’ouverture culturelle, d’éducation, de réparation des bobos de la vie ….etc… Comment peut-on encore aujourd’hui accorder aussi peu de crédibilité à ces structures qui portent à bout de bras toutes ces actions en faveur des populations ?

La philosophie des ludothèques est centrée sur l’accueil des personnes, quelques soient leurs profils, leurs faiblesses, leurs difficultés, leurs compétences, leurs capacités,… On y accueille les personnes telles qu’elles sont !  Les ludothèques offrent un espace de décompression, pour se détendre et partager de bons moments avec d’autres autour du jeu.  Le ludothécaire fait du lien dans son quartier, sa commune, sa communauté de communes, sa ville…

Le ludothécaire accueille, il est là auprès des personnes, auprès des habitants, il les écoute, partage, réconforte parfois, enrichit, conseille et oriente.

LE JEU ET LE LIVRE

livre et jeu

L’intégration du support livre en ludothèque et du support jeu en  médiathèque peut s’avérer pertinente à condition qu’elle soit bien réfléchie et qu’autant de crédit soit porté au jeu, qu’au livre, d’autres supports peuvent être associés. Actuellement on évoque ce service comme le 3ème lieu. Mais pourquoi 3ème ? Ceci sous entend qu’il y en ait 2 autres. En effet, Ray Oldenburg qui a imaginé ce concept dans les années 80, indiquent que les 2 premiers sont la maison et le travail (ou l’école), le 3ème lieu et un espace où les populations se retrouvent pour exercer une liberté de choix d’activité culturelle et sociale.

Dans les villages, ou dans les quartiers de villes, il est en effet intéressant d’ouvrir un service central (spacieux) permettant de se retrouver pour y faire des activités variées (lecture, jeux dont jeux vidéo, multimédia, apprentissages divers comme les langues ou autres…) – on retrouve ceci dans les centres sociaux ou autres organismes qui ont vocation a proposer des activités ou supports de culture aux habitants.

Des Ludo-Bibliothèques ou des biblio-ludothèques fonctionnent déjà depuis de nombreuses années. Dans notre région des Pays de la Loire, des Villes se sont lancées. Par exemple à Saint Herblain, La Roche sur Yon,  Château du Loir, Sainte Luce sur Loire,…  et pas très loin, Niort, mais aussi ailleurs, Tourcoing ou la Grande motte, dans la région parisienne à Fosses, ou encore  au Québec ou ailleurs…

Plusieurs possibilités existent  :

1/ Cohabitation de 2 services indépendants : ludothèque, bibliothèque. Coller un service à côté d’un autre,

2/ Cohabitation de 2 services dépendants de la même hiérarchie, ceci permet de rationaliser les moyens : espaces, budgets, ressources humaines, mais si les supports culturels restent séparés, ceci rejoint la première possibilité…reste néanmoins l’avantage pour le public de pouvoir fréquenter 2 services proches,

3/ cohabitation de la ludothèque à une médiathèque ou d’un espace bibliothèque à une ludothèque, ceci nécessite de repenser les fonctions des locaux et les concepts de fonctionnement qui étaient plutôt basés sur la séparation des supports, donc des métiers par secteurs. La nouveauté implique de revoir les espaces en fonction des catégories de publics, de leurs besoins et des interactions envisageables. Ceci implique de mettre à disposition les supports complémentaires que peuvent être les livres, DVDroms, jeux, albums… sur un même espace et de donner les mêmes moyens au jeu qu’aux autres supports, et plus d’espaces, ce qui est une étape difficile lors de cette mutation.

Si vous êtes dans cette dynamique de vouloir se faire, se côtoyer,  le jeu et le livre, alors pensez que le jeu prend plus de place que le livre dans son utilisation, il génère aussi plus de bruits. Il est donc nécessaire d’intégrer ces 2 contraintes pour réussir cette cohabitation. Les sections d’études devront donc être isolées pour laisser place au lieu vivant en place centrale autour des jeux, des albums, de la musique, etc…

Il convient d’amorcer une réflexion sur l’aménagement de vos espaces en intégrant une offre culturelle adaptée à l’accueil des catégories de publics tout en offrant tous les supports culturels qui deviennent ainsi complémentaires, le livre et le jeu, la musique, albums, vidéo et autres outils par catégories de publics et de limiter les forêts de livres telles qu’elles sont proposées dans beaucoup d’établissements…

J’imagine de beaux espaces  pour que le public se sente « comme à la maison » avec des micro espaces confortables multipliés. Le 3ème lieu (concept né dans les années 80 en Floride par Ray Oldenburg) devrait tenir ses promesses sous diverses conditions. Les collectivités doivent notamment prendre en compte les évolutions sociétales pour  :

  • affiner leurs offres culturelles aux nouveaux besoins des populations,
  • offrir aux publics des lieux où chacun peut trouver sa place,
  • penser à préserver la liberté de choix des supports et des pratiques culturelles,
  • apporter des réponses dans un secteur géographique proche (service de proximité),

Plusieurs facteurs doivent être concomitants pour réussir le développement d’un 3ème lieu :

  1. Etre un espace neutre et vivant,
  2. Avoir des habitués qui le fréquentent,
  3. Bénéficier d’une atmosphère de détente, conviviale, un peu comme à la maison,
  4. Favoriser la joie et chaleur humaine, bien accueillir,
  5. Avoir le sentiment d’appartenance à une communauté,
  6. Permettre de vivre des expériences nouvelles, fantaisistes qui surprennent,
  7. Proposer un cadre propice aux rencontres et aux échanges,
  8. Renforcer la cohésion sociale par les liens intergénérationnels et interculturels,

Ray Oldenburg indique que différents types de lieux font office de 3ème lieu : le café, le co-working, la maison de quartier,…Les médiathèques et les ludothèques pourraient élargir leurs compétences en s’adaptant aux nouveaux besoins des populations.

Comment faire ?

Tout d’abord, il convient d’imaginer au moins 10 à 12 micro-espaces intégrant des espaces du jeu conjointement lié au lire pour chaque catégorie d’utilisateurs. Ce matériel reste sur place  et maintient une offre hautement qualitative. Les jeux et jouets à emprunter sont installés près de l’accueil. Ceci permet de mieux gérer la problématique de la maintenance des collections.

Vous pouvez consulter l’article consacré à l’aménagement d’une ludothèque. Il pourra vous aider à comprendre les problématiques liées au jeu et surtout d’entrevoir les besoins des individus en fonction de leur développement.  Il convient pour vous de prévoir plusieurs micro-espaces avec des coins dans lesquels des jouets/jeux/ livres peuvent être mis à disposition de vos publics, le mobilier sur roulettes offrent aussi des possibilités de propositions ludiques ainsi que des corbeilles de jeux posées sur les tables, des présentoirs,… l’idée étant que chacun trouve sa place et s’installe selon ses envies ou besoins.

Par ailleurs, le jardin est un espace inclusif qui offre de multiples possibilités à voir aussi l’article sur l’aménagement d’une ludothèque.

De l’autre côté de l’hexagone, certains se sont prêtés au jeu ! Ils ont imaginé un espace et l’ont réalisé :

Bibliothèque Monique Corriveau au Québec

Bibliothèque de Hjorring au Danemark

Autres sites en France :

Et enfin la bibliothèque 3ème lieu de Saint Aubin du Pavail qui a développé de nombreux projets intéressants pour les populations dans un esprit convivial.

Bibliothèque 3ème lieu de Saint Aubin du Pavail

Autre info :

Beaucoup de ludothèques côtoient les bibliothèques, c’est le cas de la ludothèque de Bourg Saint Maurice. La Communauté de communes a construit 2 espaces culturels rapprochant ainsi le livre et le jeu.

A l’ONG A.V.E.C. à Battambang  au Cambodge, un fonds livres est développé en lien avec un fonds de jeux et de jouets au sein du refuge d’enfants

A lire aussi les ouvrages divers sur le 3ème lieu :

L’ouvrage intitulé Bibliothèque 3ème Lieu, sous la direction d’Amandine Jacquet

Autre outil : l’étude intitulée « Jeu et Bibliothèque : Pour une conjugaison fertile » réalisée par l’Inspection générale des bibliothèques. Les centres universitaires formant au métier de ludothécaires et autres acteurs du domaine très spécifique des ludothèques et du jeu auraient pu être associés à cette étude pour apporter un éclairage sur la pratique du jeu et ce qu’elle implique en dehors du champ théorique

Voir aussi l’article suivant :  Allons jouer à la bibliothèque – Gazette des communes

et les travaux d’études suivants :

DARFEUILLE, Claire. La biblio-connection concilie le livre, l’écran et le jeu [en ligne]. Paris : Goethe-Institut, 2014.

STAMPFL, Nora S. La ludification du savoir – Les bibliothèques se transforment en espaces ludiques [en ligne]. Paris : Goethe-Institut, 2014.

ALVES, Colette. Le jeu, l’écran, la bibliothèque : Journée d’étude, Alfortville (94), 2 avril 2012. Bibliothèque(s) [en ligne], 2012, n. 64, p. 64-65.

DRES, Hélène. Le jeu et la bibliothèque, un outil pour changer d’image ou un réel changement ? [en ligne]. Mémoire de Master II, Sciences Humaines et Sociales, mention Sciences de l’information et de la communication, parcours Métiers du Livre, option Bibliothèque. Saint-Cloud : Université Paris Ouest – Nanterre – La Défense, 2010.

Vous pouvez me contacter pour mettre en lien votre structure ou compléter cet article par votre contribution.

Merci d’avance,

ogerpatricia@orange.fr